mardi 25 janvier 2011

Un pays - L'Islande

Lisse, lent. De bout en bout, tel est le vaste territoire basaltique qui gît amoureusement au pied du cercle polaire. Ce petit état, dont la capitale est Reykjavik, est né comme les plus épais furoncles, d’éruptions intempestives qui vinrent froisser dans un cas une peau juvénile angélique et dans l’autre une mer parfaite, glaciale, ininterrompue. Il n’en demeure pas moins que ces éruptions volcaniques sous-marines créèrent un pays dans le plus grand secret. Ce n’est qu’en 700 que les hommes osèrent poser le pied sur ce roc austère. Ce furent d’ailleurs de moines irlandais, insouciants qui se promenaient en pagode qui ont atterri là sûrement par hasard. Comme dans le N. de l’Europe vers le milieu du IXème siècle, les Vikings débarquèrent un matin pour violer la plupart des femmes, quelques enfants et brûler ce qui n’était ni l’un ni l’autre. À ce rythme, il y eut bientôt 40 000 Vikings tressés sur l’île et les moines irlandais étaient repartis de vers chez eux.

Ces Vikings, alors conquérants et explorateurs, virent dans l’Islande un relais idéal pour aller plus à l’ouest. Ainsi, Eric le Rouge partit de là-bas pour atteindre le Groenland vers 985. Les balbutiements de la démocratie se faisaient entendre alors avec la constitution de la première assemblée d’hommes libres, l’Althing, en 930. Cette assemblée possédait la législation et l’administration jusqu’à ce que le Christianisme ne fût introduit en 1000 et ne sema le trouble deux siècles plus tard. À l’issue de ces guerres, l’Islande tomba sous domination norvégienne en 1262 tout en gardant une certaine autonomie, du fait de sa distance géographique sans doute. Puis sous domination danoise après que le Danemark eut conquis la Norvège en 1380.

La Réforme n’atteignit l’île qu’en 1550 et dégrada considérablement la situation économique. Le XVIIIème siècle fut calamiteux pour les Islandais qui connurent des épidémies de variole en 1707, des éruptions volcaniques en 1765 et 1783, une famine en 1785 et enfin la ruine économique de la Compagnie danoise d’Islande qui possédait un monopole commercial sur l’île. La suppression de ce monopole eut lieu en 1786 et l’île commença à faire du commerce avec le reste du monde en 1854. A signaler tout de même, qu’un aventurier danois du nom de Jurgensen prit possession de l’île avec un appui bien pesé des Anglais (les perfides) en 1809. Ce cher brigand garda les commandes du pays jusqu’en 1814 et le traité de Kiel qui rendit l’île aux Danois. Ceux-ci prirent un tournant plus libéral qui menât progressivement à une déclaration d’autonomie de l’Islande en 1918 pour 25 ans. Dès 1937, les Islandais, à travers un référendum, signifièrent qu’ils ne renouvelleraient pas l’aventure. La prise du Danemark par le vil envahisseur nazi mit un terme définitif à la relation de dépendance entre les deux pays. Occupée pendant la guerre par les Anglais puis par les Américains, l’Islande proclama son indépendance le 17 juin 1944. Elle avait alors sur son territoire une puissante base militaire américaine. Elle accepta de rentrer dans l’OTAN en 1949 et bénéficia même du Plan Marshall avant de permettre en 1951 aux Etats-Unis de consolider leurs installations militaires sur l’île, à Keflavik. En conflit avec la Perfide Albion pour faire prévaloir son domaine de pêche, elle s’éloigna des Alliés et trouva un accueil et un refuge tout à fait intéressé dans les fourrures de l’URSS. L’ennemi communiste accepta d’acheter une grande partie de la production de pêche contre l’exclusivité de l’approvisionnement en pétrole de l’île. Des conflits ouverts avec l’Angleterre ré-éclatèrent en 1964 et 1971. Malgré cela, les Islandais restèrent de farouches nationalistes et eurent la particularité d’élire par trois fois dans les années 80, Vigdis Finnbogadottir (une femme) à la présidence de leur pays.

Mais comment ce petit pays a-t-il fait faillite ? Petit ? Eh bien non ! Outre les ressources abondantes en poissons, l’Islande, du fait de son activité géothermique, attire des industries consommatrices d’énergie. Au premier rang desquelles figurent les fabricants d’aluminium. Son niveau de vie était plutôt élevé en 2008 et la couronne islandaise était assez forte. Mais les quatre banques principales du pays avaient du mal à se reposer sur une population trop faible, quelques 300 000 âmes, pour asseoir leur croissance. Elles ont donc contracté près de 100 milliards de dettes à l’extérieur tout en maintenant des taux d’intérêts élevés, supérieur à 15% contre 4% en Angleterre par exemple à la même époque. Ce qui conduisait les investisseurs à placer leur argent en couronnes et alimenter ainsi l’inflation. La masse monétaire a gonflé de presque 38 % sur les douze mois précédant août
2008 alors que dans le même temps le PIB n’avait augmenté que de 5%. Une bulle financière s’était créée.

Les trois principales banques se sont bientôt retrouvées en difficulté pour honorer les emprunts qu’elles avaient contractés auprès d’organismes étrangers et ne purent se tourner vers leur banque centrale qui, se reposant sur l’économie islandaise bien plus faible, était incapable de les aider. La bulle financière d’alors est parfaitement illustrée par les notations ci-dessous des quatre grands organismes mondiaux. Lors de l’éclatement de cette bulle fin septembre, on constate la rapide dégradation de la note…
Les réserves officielles de la banque centrale Islandaise à la fin septembre 2008 étaient à peu près égales au cumul des dettes à court terme des principales banques du pays et tournaient autour de 360 milliards de dollars. De la même manière, à la fin juillet 2008, la dette extérieure islandaise était de 9 553 milliards de couronnes dont 80% détenus par les banques contre un maigre 1279 milliards de couronnes de PIB en 2007…


Agency
29 Sept.
10 Oct.
Fitch
A+
BBBĞ
Moody
Aa1
A1
R&I
AA
BBBĞ
S&P
BBB



Résultat : les trois principales banques ont été nationalisées. Il s’agit de Glitnir, Landsbanki et Kaupthing. La fermeture de certains départements de ces établissements entraîne déjà du chômage et l’Islande continue à ne rien faire comme les autres et reste ainsi à l’écart, avec une économie qui mettra du temps à s’en relever, et en étant pour l’éternité coincée entre l’Islam et Israël… Alphabétiquement.

D.A. – CC18 « La Faillite » - Mars & Avril 2009

Sources:
Le Petit Mourre, Edition Bordas

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