Forte d’une identité culturelle et d’une histoire multimillénaire, l’Égypte a illuminé le monde connu pendant des siècles. Cependant, le temps et le sable ont eu raison de la puissance égyptienne, cédant peu à peu aux influences et invasions étrangères. Ainsi, passant sous dominations grecque, romaine, arabe, ottomane ou européenne, l’Égypte ne retrouva jamais une stature mondiale. Malgré tout, le vingtième siècle a vu émerger ce pays en tant que puissance régionale dans un environnement pourtant réputé instable. En effet, son peuple s’est unifié sous la bannière du nationalisme, avec comme porte-étendard : Gamal Abdel Nasser.
Fils d’un modeste employé de poste, Gamal Abdel Nasser est donc né le 15 janvier 1918 à Bani Murr, un petit village non loin d’Alexandrie. Il grandit à Alexandrie puis au Caire avec ses oncles au contact desquels il développe son penchant pour la contestation. Son militantisme indépendantiste le poussera à être emprisonné dès ses 16 ans après des altercations avec la police. Il intègre néanmoins l’Académie militaire royale, qui a ouvert depuis peu ses promotions aux garçons de milieux moins aisés, et en sort diplômé en 1938. Il entame ainsi ce qui sera une brillante carrière militaire.
Même si l’Égypte est indépendante depuis 1922, la Grande-Bretagne tire manifestement encore les ficelles du pays, ce qui motive Nasser à créer le mouvement révolutionnaire clandestin des officiers patriotes et à lutter contre les élites en place. Quand vient la guerre israélo-arabe de 1948, le lieutenant-colonel Nasser est blessé par un sniper et humilié par la défaite de son pays. Il décide alors de fonder le mouvement des officiers libres et se convainc qu’il faut bouter les anglais (sport très en vue à l’époque) hors d’Égypte. Il est convaincu de la nécessité de renverser la monarchie, de moderniser les structures économiques, politiques et sociales du pays, ce qu’il fait lors du coup d’état du 23 juillet 1952 en déposant le roi Farouk Ier sans effusion de sang. En 1953, la république est donc proclamée et Nasser nomme le général Muhammad Néguib président, tout en s’octroyant les postes cumulés de vice-président et de ministre de l’intérieur. Ainsi il entreprend immédiatement des réformes agraires pour créer une classe moyenne de propriétaires terriens et fonde un parti unique, le rassemblement de la libération (qui deviendra l’Union nationale en 1958 puis l’Union socialiste arabe en 1962). Il nationalise l’industrie et met en place des grands chantiers publiques tel le barrage d’Assouan (non, les pyramides c’est pas lui !).
Nasser est un virulent défenseur de l’indépendantisme et ne souhaite pas se faire intégrer dans un des deux blocs, occidental et soviétique. C’est pourquoi il est l’un des créateurs du mouvement des pays non-alignés (sorte d’union tiers-mondiste voulant servir de troisième voie par rapport aux deux autres blocs) qui est fondé en 1955 lors de la conférence de Bandung.
Sa soif de pouvoir n’est toujours pas étanchée, dès 1954, il s’accapare progressivement du pouvoir avant d’être élu officiellement président de la République via un référendum, le 23 juin 1956. Mécontent du refus anglo-américain de financer son barrage, il décide de nationaliser le canal de Suez. En effet, tel le Nil, l’égyptien est très capricieux! Malgré l’intervention des forces Anglaises, françaises et israéliennes, Nasser n’abdique pas dans cette crise et en sort même grandit. Il en acquiert son statut, et sûrement quelques statues, de super star du monde arabe. Devant ses différents coups d’éclats, les populations arabes se mettent à vénérer cet homme qui s’impose comme un des leaders arabes des plus influents.
Sur la lancée de son désir d’émancipation et de libération des peuples « opprimés », Gamal Abdel Nasser, qui soutient déjà des mouvements révolutionnaires tels le FLN en Algérie, décide alors de rétablir les droits du peuple palestinien (rien que ça!). En 1967, en s’alliant avec la Syrie et la Jordanie, il pense contraindre Israël à se soumettre, notamment en organisant un blocus de ses ports. Nasser commet alors une erreur d’appréciation, les israéliens qui n’aimant pas se faire marcher sur les pieds, rétorque en attaquant l’Égypte sans même prendre le temps de leur déclarer la guerre (Ils ne sont pas très sport, mais nécessité oblige…). Ce qu’on appellera le guerre des six-jours (le septième étant chômé), provoque la démission de Nasser mais les manifestations de rues lui demandent de rester au pouvoir.
Affaibli par la guerre, Nasser et l’Égypte se rapprochent de l’URSS pour reconstituer une armée. S’étant fait chapardé ce au lieu touristique qu’est le désert du Sinaï (mais aussi le canal de Suez), Nasser décide de lancer une « guerre d’usure » (1969-1970) pour harasser et narguer les troupes israéliennes basées sur la ligne de cessez le feu. Malheureusement, les troupes égyptiennes payent une lourde tribu face à Israël et, sous la pression soviétique, Nasser est contraint d’accepter le plan Rogers de paix global.
En juillet 1970, Il finit par cesser cette « guerre d’usure », et son cœur usé, ayant donné trop d’amour au peuple, finit comme le fameux canal, en crise. Cette fois ci, le 28 septembre, il en mourra. Ses funérailles rassembleront plusieurs millions de personnes. Il laisse donc sa place à son ami et successeur, Anouar el-Sadate.
Gamal Abdel Nasser reste, à ce jour, un leader charismatique qui a rendu sa fierté au peuple Arabe dans sa recherche d’union. Il aura permis de réformer son pays de fond en comble, de donner un accès à l’éducation aux classes les plus démunies, et de développer le monde artistique pour permettre au Moyen-Orient de briller.
J.S. – CC11 “Les Caprices” – Avril 2008
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