lundi 17 janvier 2011

Un homme - Aristide Briand

Ou la naissance d’une conscience européenne

La notion d’Europe a toujours était plus ou moins large à travers les âges. Des romains à Napoléon, en passant par Charlemagne ou Charles Quint, l’idée d’une unification des pays d’Europe a toujours était liée à la notion d ’empire et due aux aléas des conquêtes militaires. Pourtant vers la fin du XIXème siècle (surement un des effets de la guerre franco-prussienne), la nécessité de construire une union des pays européens, afin d’y amener la paix et la prospérité, se forge dans l’esprit de certaines politiques dont l’autrichien Richard Nikolaus de Coudenhove-Kalergi ou le français Aristide Briand (certains philosophes et penseurs avaient déjà rêvé d’un tel projet). Malheureusement, le contexte politique ne leur donnera pas la possibilité qu’ont eu Jean Monnet, Robert Schuman, Konrad Adenauer et consorts, d’en jeter les fondements. Nous allons nous intéresser, tout de même, aux balbutiements d’une conscience européenne qui germa dans l’esprit d’Aristide Briand et qui fit de lui un fer de lance de la diplomatie européenne.

Aristide Briand naît en 1862 à Nantes dans une famille de modestes aubergistes. Vivant à Saint-Nazaire, il fera ses études supérieures à Nantes où il s’oriente vers une carrière de juriste. On reconnait en lui un très grand orateur, talent qu’il sait mettre aussi à l’écrit en tant que journaliste dans des journaux de gauche tels la Démocratie de l’Ouest, La Lanterne ou encore L’Humanité (dit « l’Huma » lorsqu’on est branché!). En 1888, il suit donc la voie qui semble tracée et rentre en politique en se faisant élire conseiller municipal de Saint-Nazaire.  A peine un an plus tard, il démissionne pour se présenter aux législatives mais ne parvient pas à se faire élire. Il s’occupe alors du sort des ouvriers locaux avant de monter à Paris en 1893. Malheureusement, la politique parisienne n’est pas plus tendre et Briand continue sur une lignée d’échecs due peut être à son radicalisme.
Il reprend son parcours d’avocat en 1900 mais revient vite en politique. En 1902, n’aimant point les étiquettes politiques établies, il cofonde le parti socialiste avec un certain Jean Jaurès avec qui il se lie d’amitié. Il se fait aussi élire député de la Loire et participe au projet de loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat (1905). A partir de ce moment, il officiera toujours dans un quelconque mandat.

En 1906, il devient, pour la première fois, ministre de l'instruction et des cultes. En 1909, il succède à Clémenceau en tant que président du conseil. Aristide commence à se dé-radicaliser ce qui lui vaudra son longévité politique (23 fois ministre dont 16 des affaires-étrangères et 10 fois président du conseil).
A l’issue de la première guerre mondiale l’Europe est ravagée, ce qui le décide à amorcer une politique de réconciliation avec l’Allemagne, appuyée par la SDN (ancêtre de l’ONU). En 1922, lors de la conférence de Cannes, il se dit pour l’aménagement de la lourde dette allemande mais son attitude pacifique est vivant critiquée en France et il est poussé à la démission.

En 1924, il est nommé représentant français à la SDN et perpétue son action de réconciliation. En 1925, il est renommé ministre des affaires étrangères et, lors des accords de Locarno, il signe avec son homologue allemand Gustav Stresemann un pacte d’assistance mutuelle qui leur vaudra le prix Nobel de la paix en 1926.
Après avoir aidé l’Allemagne à adhérer à la SDN, il s’efforce d’impliquer les Etats-Unis dans le règlement des conflits internationaux. Il signe notamment le traité Briand-Kellogg, avec le secrétaire d’Etat du même nom, visant à mettre la guerre hors-la-loi.

En 1929, lors d’un discours à la SDN, il suggère la création d’une union régionale, d’une « fédération européenne » qui veillerait aux intérêts économiques sans toucher à la souveraineté. En 1930, Briand adresse un mémorandum au 27 délégués de nations européennes de la SDN concernant une éventuelle fédération. Mais la commission d’étude de ce projet (présidée par Aristide) créée par la suite se heurte au nationalisme économique des états attisé par la crise économique internationale. La montée des dictatures et la seconde guerre mondiale auront aussi pour effet de reporter les ambitions européennes de Briand et des autres éclairés.

Ce projet sera finalement, comme nous le savons, porté à terme  mais Aristide Briand n’aura pas le loisir de l’apprécier car il s’éteint en 1932 à Paris. Souvent critiqué par certains de ses pairs, celui qu’on appelait le « pèlerin et apôtre de la paix » n’en reste pas moins un grand politicien français et européen, un homme de paix et de raison. Il laisse donc derrière lui les prémices d’un projet qui révolutionnera les pays européens et les hommes. 


J.S. –  CC15 "L'Europe"– Septembre & Octobre 2008

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