On entend souvent, lorsqu'un groupe atteint son deuxième ou troisième album, que c'est "l'album de la maturité".
Ce devrait être universellement reconnu comme une insulte, cette "maturité" dont on fait l'éloge. La maturité annonce en effet le plus souvent le début de la fin. Tous les groupes qui ont vraiment apporté quelque chose à l'histoire du Rock avaient moins de trente ans, la révolte, la spontanéité et l'urgence qui vont avec. On me citera alors plein de contre exemples pour me renvoyer dans mes 22, mais si de nombreux artistes ont réussi à faire un bon comeback sur le tard en faisant une musique exprimant toute leur sagesse et leur vision de la musique, en faisant un retour aux sources ou encore en se forgeant une nouvelle peau; leur démarche est forcément, et souvent malgré eux, porteuse de bien peu d'énergie face à la fraicheur candide et spontanée des jeunes qui en veulent et dont les rêves n'ont pas encore été brisés.
Il faut dire que le Rock, en particulier, n'est pas une musique très bien dimensionnée pour les anciens. Premièrement, ca se joue avec des instruments très simples, faciles, avec des rythmiques carrées et une structure simple. La batterie, la guitare ou la basse ça s'apprend très vite; une ou deux années suffisent amplement pour avoir le niveau suffisant pour très bien jouer 90% des morceaux. Des très bons musiciens ultra expérimentés font en général une musique très lisse et sans véritable accroche, et c'est du gâchis de mettre d'aussi bons musiciens sur une musique aussi simpliste...regardez Dire Straits par exemple! Ensuite, on est forcés de constater que les formations ne tiennent pas bien longtemps! La plupart du temps. Les groupes qui au bout de 3 ou 4 ans ne se séparent pas ne courent pas les rues, c'est le moins qu'on puisse dire. Et puis s'il n'y a pas de breakup, il y aura toujours des histoires de drogues, de sexe, de prison, de suicides, de noyades, ou encore de dépressions nerveuses pour relever la sauce. N'oublions pas non plus le public, qui lui aussi est plutôt jeune. Imaginez un concert de rock avec dans la salle, une moyenne d'âge au-delà de 30 ans... Vous en avez des frissons dans le dos, non? Et puis les groupes jeunes, ils en veulent, ils prennent du plaisir à jouer, ils découvrent leur public, c'est nouveau pour eux, c'est donc nouveau pour nous! Ils ne pensent pas encore aux journalistes et aux critiques, ils font leur truc sans se poser de questions, y croient à mort... C'est tellement plus Rock tout ça!
Alors s'il vous plaît, dites-moi pourquoi on n'écoute que des vieux? Qu'est-ce qu'il s'est donc passé, pour qu'il n'y ait que des artistes de plus de 40 ans pour remplir les stades? Pourquoi nos iPods et nos disques durs externes sont tous blindés de Led Zeppelin, Beatles, The Clash, Rolling Stones, Jimi Hendrix, The Doors, Bob Dylan, Queen, etc. Quand on y réfléchit trois minutes, c'est terriblement déprimant, non? C'est pour ça que j'appelle (figurativement, je précise) à tuer les vieux groupes qui jouent encore. A les laisser pourrir au bord de la Route 66 et de ne même pas laisser les charognards se nourrir de leur charpie. J'appelle à boycotter les méga concerts des Stones ou encore de Police. Ne vous méprenez pas, moi aussi, comme vous, je les aime. C’est pour cela
que je veux les laisser partir au bon moment, c'est à dire il y a déjà quelques dizaines d'années.
J'invite tout le monde à se tourner vers la nouvelle génération, vers ces jeunes qui apportent quelque chose de nouveau, vers cette énergie créatrice et tournée vers l'avenir qui est propre au Rock. Je conseille vivement tous nos lecteurs parisiens à aller régulièrement voir les concerts du Nouveau Casino, de la Flèche d'Or, et de la DeMEnT3d (héhé autopromo...) Je cite aussi quelques noms intéressants de jeunes artistes à suivre, histoire qu'on puisse se plonger vraiment dans le vif du sujet: Blackjoy, Vampire Weekend, Poni Hoax, !!!, The Do, Les Shades, LCD Soundsystem (je mens comme je respire, James Murphy est trentenaire...), et pour plus de noms envoyez-moi un mail à l’adresse de la rédaction Culture Cube, il y a de quoi faire, la relève est assurée!
J.H. – CC14 « L’Olympisme» - Juillet & Août 2008
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