C’est aujourd’hui un des trois pays au monde, avec la Chine et l’Inde, qui possède le plus grand potentiel de développement économique : le Brésil a une histoire mouvementée et un futur plein de promesses. Plus grand pays d’Amérique du Sud, surtout connue pour sa célèbre forêt amazonienne, véritable poumon de la planète, ce grand pays s’affirme comme le premier pays « vert » du monde, multipliant les investissements dans le durable et les innovations technologiques et législatives dans ce domaine. Faisons un élégant saut de quelques siècles en arrière pour comprendre qui est le Brésil.
« Pas évident » opinait le Roi d’Espagne quand on lui demandait comment il avait pu découvrir les Amériques en ratant le Brésil. Et oui, ce n’était pas évident-évident de passer à côté de ce mastodonte aux ressources naturelles inépuisables. L’Espagne et le Portugal régnaient au XVème siècle sur les océans comme le fit plus tard l’Angleterre, et finissaient éventuellement par mettre le pied dans les Caraïbes en 1492, comme nous le savons tous. Ceci dans un contexte de découverte en effervescence, car les espagnols découvraient le Nouveau Monde tandis que les Portugais étaient en train de longer l’Afrique et de s’en approprier toutes les richesses. Fait moins notoire, en 1494, à la demande du roi du Portugal Jean II, Ferdinand de Castille et sa femme Isabelle d’Aragon acceptèrent de renégocier les termes d’un traité de partage de l’Afrique. Ce traité, ratifié par les deux parties à Tordesillas, actuelle Valladolid, assurait aux espagnols les Canaries et toutes les terres situées plus à l’ouest que 340 lieues de l’Afrique, et le Cap Vert, Madère, le droit de conquête du Maroc et ce qui était à l’est de cette même distance au Portugal. C’est la raison pour laquelle, en 1500, lorsque Pedro Alvares Cabral découvre le Brésil, les espagnols n’essayèrent pas de le revendiquer. Contrairement aux Français qui tentèrent en 1555 d’installer la « France Antarctique » dans la baie de Rio.
Ainsi donc le Brésil fut portugais par le hasard des distances. Dès le début du XVIème siècle, la colonisation s’accéléra et les nombreux colons qui arrivent sur place réduisent rapidement en esclavage les amérindiens locaux pour exploiter la canne à sucre et le bois, exactement comme le faisaient les espagnols à Cuba. De la même manière, les amérindiens vinrent à manquer rapidement. On eut alors recours, chose facile pour les portugais qui avaient d’importantes colonies en Afrique, à l’importation d’esclaves venus de nombreux pays et surtout de l’Angola. Le Brésil devient alors le premier exportateur de canne à sucre au monde et participe activement à son commerce avec les européens.
C’est surtout l’aspect démographique qui est, à mon sens, le plus intéressant. Le trafic maritime de l’époque n’étant pas des plus rapides, les colons portugais qui avaient tenté leur chance au Brésil était à peu près 20 000 en 1570, contre 30 000 esclaves africains amenés contre leur gré sur place et 800 000 amérindiens locaux. Les continentaux étaient principalement des hommes, prêts à affronter les difficiles conditions imposées par ce sauvage et luxuriant environnement. S’il est un besoin que nul n’a jamais aliéné à l’Homme, c’est bien celui de se reproduire. C’est dans ces conditions que sont nés la formidable diversité et le métissage quasi-total de la population du Brésil. Dès 1650, 70 000 colons cohabitent avec 100 000 esclaves noirs et il y a déjà 80 000 métis ! La difficulté de maintenir ce système apparaît dès lors, la démographie poursuivant son inexorable rapprochement des populations et continuant de faire augmenter la part de métis de toutes sortes face aux colons. L’Eglise avait un rôle beaucoup plus frontal qu’aujourd’hui, et celle-ci interdisait l’esclavage des amérindiens et encourageait grandement celui des africains, permettant ainsi au christianisme de progresser face à l’islam. Les révoltes commencent alors à gronder de manière de plus en plus répétée tout au long du XVIIème et XVIIIème siècle.
Le grand renversement s’opère en 1775 lorsque l’esclavage des indiens est aboli ; ce qui se répercute par un trafic accru des esclaves africains. Progressivement, les grands propriétaires mettent main basse sur la traite négrière et sur les instances politiques, appuyés par les commerciaux étrangers qui ont tout avantage à mettre au pouvoir les gens avec lesquels ils négocient. Le Portugal voit donc son emprise sur cette immense colonie disparaître peu à peu.
Au début du XIXème siècle, Napoléon prend le pouvoir, en France. Vouant une haine véhémente aux anglais, le petit caporal impose un embargo européen sur la perfide Albion. Ordre suivi par tous, sauf par… le Portugal qui tente de conserver ses liens historiques avec l’Angleterre. L’ultimatum lancé par l’empereur n’y changera rien, le Portugal est donc envahit en 1808 par les troupes françaises. Le roi Jean VI fuit alors vers le Brésil et déplaça la capitale ainsi que toute la cour au Brésil. Le Brésil n’est donc plus une colonie mais bien un Royaume, à qui l’Angleterre offrit sa protection maritime en échange d’avantageux contrats commerciaux. A tel point qu’à la mort de Napoléon en 1821, le roi Jean rentra au Portugal et laisse son fils Pierre régent du Brésil. Ce dernier refusa de suivre son père au Portugal et proclama l’indépendance du Brésil dès l’année suivante. A ce moment, 2 millions d’esclaves africains et 700 000 métis sont exploités par 920 000 « blancs ».
Pierre Ier, dont vous pourrez lire la biographie ci-dessous, abdique à la mort de son père en faveur de son fils de 5 ans en espérant réunifier les deux royaumes du Portugal et du Brésil. C’est au cours de son règne que l’esclavage est interdit ce qui mène la puissante coalition des propriétaires terriens à fonder le Parti Républicain pour lutter contre l’inexorable progression des droits humains qui avait pris son envol en France en 1789 pour traverser le monde durant ce siècle. L’esclavage brésilien sera finalement aboli en 1888 et aura touché 5,5 millions d’africains. Juste à temps me direz-vous, car les grands propriétaires renversèrent le roi et proclamèrent la République. Jusqu’en 1930, l’immigration sera très forte, majoritairement composée d’italiens, d’allemands et d’espagnols, et fera de Sao Paulo la région la plus peuplée du pays. Hélas, mise en difficulté par la crise des matières premières qui suivit ma guerre favorite (celle de 14-18), l’économie du Brésil s’effondra après le krach de 29. S’ensuit un nouveau coup d’état qui instaura une dictature militaire qui permet l’émergence d’une classe moyenne et de la stabilisation économique relative du pays jusqu’en 1964.
Le putsch, alors très en verve dans toute l’Amérique du Sud, permet à de nombreux dictateurs militaires de se hisser au pouvoir avec l’accord préalable des instances dirigeantes de la CIA naturellement, ne nous en cachons pas. Ces dictatures furent par contre, au Brésil comme dans les pays qui, timidement, le jouxtent, extrêmement répressives et cruelles.
Heureusement, cela fini bien, cinq coupes du monde plus tard, le Brésil est entré dans le socialisme depuis presque 25 ans ; a su limiter avec efficacité la corruption ; assainir les finances de l’Etat et la dette publique ; contrôler son inflation ; se doter d’une très forte identité multiculturelle ; devenir le centre du monde le temps d’un carnaval ; amorcer avant n’importe quel autre pays du monde, la conversion de son parc automobile en voiture écologique ; ramener sous la barre des 10%, sa part de population vivant avec moins de 1$ par jour ; et par sa forte démographie et son enrichissement devenir un pays qui risque de rattraper plus rapidement qu’on ne le croit le grand frère Etats-uniens.
D.A. – CC12 « Les Récompenses» – Mai 2008
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