mercredi 26 janvier 2011

SouDev - Malabo

Pourquoi SouDév ?

Pour Soutenable Développement bien sûr, ou plus communément appelé Développement Durable, ce nouveau concept qui désire réconcilier les dimensions sociales, économiques et environnementales dans une seule et même optique : la survie de l’espèce humaine sur cette belle planète bleue. A ne pas confondre avec Sous-développement, bien que les pays en voie de développement aient souvent l’empreinte écologique la plus faible comme la majorité des villes que nous visiterons dans les « pays du sud ». Durant ces prochains mois, nous découvrirons donc des grandes villes de notre planète verte (1/3 des terres émergées recouvertes par les forêts), et analyserons si son évolution est soutenable ou insoutenable, si son développement permet de préserver sa descendance ou au contraire l’anéantir.

Aujourd’hui nous nous pencherons sur la capitale de la Guinée Equatoriale hispanophone (« Un paradis à découvrir ») : Malabo, ville sortie de la jungle au nord de l’île de Bioko dans le golfe de Guinée.

Dès votre atterrissage à l’aéroport, vous apercevez les différentes plateformes pétrolières au loin, ainsi que la centrale de méthanol et de gaz liquéfié, vous comprenez alors rapidement que le pays a été récemment envahi et infesté par l’or noir (PIB/Hab entre les Bahamas et le Koweit), et surtout pourquoi l’avion était rempli d’occidentaux d’outre-atlantique, pas très jovials et à tendance alcoolique. En continuant sur l’unique route reliant l’aéroport au centre de la ville, vous passez un péage qui vous donne un aperçu de la corruption pseudo légale, et reflète déjà les contradictions même du pays. Vous croisez un camion accidenté en plein milieu de la route sans signalisation. Il est 20h, vous avez donc le droit au contrôle militaire avec vérification des papiers, inspection du véhicule ; la sécurité est donc bien la première dépense de l’état, suivi de très près par la construction puisque vous constatez, au loin, l’édification pharaonique d’une toute nouvelle capitale : Malabo 2 (« Mon rêve » : Theodoro OBIANG NGUEMA, président Equato-Guinéen et fondateur du Partie Démocratique de Guinée Equatoriale). N’imaginez pas que la santé et l’éducation figurent dans le top 4 du pays, car l’argent dépensé dans les deux premiers est tellement indécent qu’il ne reste rien pour les dépenses sociales du pays. Pourtant le Parti (unique) Démocratique du pays sonne communiste, en contradiction avec les Cadillac, Lincoln, Mercedes, et Porche appartenant aux 0,1 % de la population roulant sur l’autre. Néanmoins, ne vous fiez pas aux apparences, nous ne sommes, ni à Genève, ni à Malibu, ni à Dubaï, mais bien à Malabo où la misère et la pauvreté brûlent les yeux à chaque instant. Car mis à part ces nouveaux gratte-ciels modernes en construction et ces autoroutes de bitumes luisant au soleil, la population vit dans des cases en bois inondés et marche dans des chemins de terre et de boue durant la saison des pluies.

Vous voici arrivé chez vous, il n’y a pas d’électricité, donc pas d’eau et pas de plaques de cuisson. Tiens, si vous alliez au restaurant ? Evitez les légumes et les viandes, ce ne sont pas des produits frais, tout est importé (en particulier, le saint-patron du pays : San-Miguel, bière espagnole trouvable n’ importe où, n’importe quand, seule denrée « alimentaire » sans rupture avec la chaîne du froid et de contrôle d’hygiène que vous imaginé). Poisson / Plantin, une valeur sûre, se serait dommage de récupérer la typhoïde. Pas la peine de tenter de communiquer avec les autochtones locaux avec vos mauvais restes lycéen d’espagnol (langue officielle du pays, secondée par le français, puis par la langue de l’ethnie majoritaire Fang), ceux-ci ne daigneront pas répondre ; la tendance est à la morosité et à la lamentation constante. En effet, au « comment allez-vous ? » vous recevrez toujours un « un peu bien » ou un « supportant » qui ne donne aucunement le baume au cœur mais plutôt un certain désespoir. Passage dans le club boite de nuit discothèque night club à coté, rencontre avec les princesses de la nuit locales. J’espère que vous avez un préservatif sur vous, car elle n’en a jamais sur elle et vous aurez toujours grand mal à en trouver, ce serait dommage de ramener le SIDA. Aussi, en rentrant chez vous, pensez à mettre votre ceinture, ce serait dommage de s’ouvrir le crâne dans un accident de voiture si vite arrivé. Enfin, pensez à mettre la moustiquaire avant de dormir, ce serait dommage d’attraper le paludisme. Avant de dormir dans les bras de Miss Ceiba (symbole national) ou autres, vous constatez que vous avez dépensé plus de 100 € en une soirée ! La vie serait-elle aussi chère qu’en Europe pour une qualité de vie si médiocre ?

Lendemain matin, départ à LA plage, l’unique, la seule puisque nous sommes sur une île volcanique, ne vous fiez pas aux milliers d’expatriés et de détritus qui jonchent la plage, ils n’ont pas encore atteint la première étape de traitement des déchets : la poubelle. Pour les expatriés, ils n’ont pas le choix, les compétences locales sont tellement faible qu’il n’y a que cela, la ville devient donc très cosmopolite (Chinois, Libanais, Israéliens, Marocains, Egyptiens, Américains, Français, Camerounais, Nigérians …). Autant vous dire que l’exploitation forestière contrôlée, la gestion des nappes phréatique, la limitation des voies de circulation en centre ville, et autres préoccupation écologique ne sont pas à l’ordre du jour, bien au contraire, le développement est calqué sur les villes européennes des années 80 : On agrandit les rues pour faciliter la circulation des voitures, on découpe les arbres pour faire des grands immeubles en béton climatisé et bien éclairé la nuit. A votre retour, heureusement, il y a de l’électricité, et de l’eau courante, réjouissez-vous, vous êtes un des rares privilégiés du pays. 24 heures à Malabo, une douche chaude et vous voilà reparti pour de nouveaux horizons.

Pourtant, si l’on regarde plus en profondeur cette petite ville de 350'000 habitants, on constatera que son empreinte écologique (alimentation à base de produits locaux non cultivés sans système de transformation industrielle et consommé sans excès directement sur place : poisson, poulet, banane plantain, manioc et orge fermenté) et que son émission de gaz à effet de serre par habitant (capture de carbone intense grâce à la jungle envahissante couvrant le pays, ville cependant congestionné par les voitures et envahie par les groupes électrogènes) sont très faibles aujourd’hui donc constitue un modèle durablement viable. Oui mais demain ? Plus la peine de continuer, vous l’aurez compris, le développement de Malabo est insoutenable, entre les difficultés économiques: corruptions, inégalités profondes des richesses et une inflation grandissante ; sociales : dictature masquée, absence d’investissement au niveau de l’éducation et de la santé, et enfin environnementales : biodiversité extraordinaire mais menacé, et respect de la nature inexistant (déforestation, déchet, réseau d’eau, énergie non renouvelable…). Et pourtant nous sommes dans la région du monde la plus abondante en eau et ressources naturelles, sans aucun problème de sous-alimentation. Tout pour être heureux, mais personne ne l’est, en même temps avec une espérance de vie de 45 ans… On comprend un peu pourquoi. Prochain départ pour une lointaine ville… bientôt…sûrement….

C.P. – CC11 « Les Caprices» – Avril 2008


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